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« Brèves douanières » au 2 avril 2024

Transport - Douane
03/04/2024
Les jurisprudences diffusées depuis le 19 mars 2024 et les textes et informations publiés depuis le 15 mars 2024 « en bref » non traités par ailleurs « dans ces colonnes ».
Futur du CDU et de l’union douanière : résolution du Parlement européen
 
Le 13 mars 2024, le Parlement européen a arrêté en première lecture sa position sur la proposition de réforme de l’union douanière et du CDU (voir Réforme de l’union douanière et du CDU : première présentation synthétique, Actualités du droit, 24 mai 2023). Cette position comporte des amendements en nombre notamment pour intégrer le règlement 2022/2399 du 23 novembre 2022 (voir Guichet unique de l’UE pour les douanes : le texte est paru, Actualités du droit, 14 déc. 2022), pour ajouter un conseil consultatif douanier (comportant des opérateurs) destiné à assister le conseil d’administration de l’autorité douanière de l’EU ou encore, bien sûr, pour apporter des précisions tous azimuts (Parlement européen, résol. législative, 13 mars 2024, P9_TA(2024)0151).
 
Sur ce sujet, voir 112-2 Proposition de réforme de l'union douanière et du CDU : présentation sommaire dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Droits de douane sur les produits céréaliers russes et biélorusses : proposition de modification à la hausse dans la NC
 
Le 22 mars 2024, la Commission européenne propose d'augmenter les droits de douane sur les importations dans l’UE de produits céréaliers russes et biélorusses pour empêcher une déstabilisation du marché de l’UE par un afflux massif de ces produits, pour lutter contre les exportations russes de céréales produites sur le territoire de l'Ukraine et que la Russie s'est illégalement appropriées, et enfin pour empêcher cette dernière d'utiliser les recettes provenant de ces exportations à des fins de financement de sa guerre d'agression contre l'Ukraine. La Biélorussie est visée pour empêcher la Russie de l’utiliser pour contourner les nouveaux droits de douane et d’acheminer ces produits dans l'UE. Une proposition de règlement du même jour tend ainsi à modifier en ce sens le règlement n° 2658/87 relatif à la nomenclature combinée (NC) : elle vise les importations de céréales, d'oléagineux et de produits dérivés relevant des chapitres 10, 12, 14, 15 et 23 de cette NC ; les nouveaux droits de douane, en fonction du produit concerné, passeraient soit à 95 EUR la tonne, soit à un droit ad valorem de 50 % et la Russie et la Biélorussie n'auraient plus accès à aucun des contingents de l'UE fixés pour les céréales dans le cadre de l'OMC, qui offrent un meilleur traitement tarifaire pour certains produits (Proposition règl. n° COM(2024)148, 22 mars 2024). En revanche, cette proposition ne vise pas le transit de céréales, d'oléagineux et de produits dérivés de Russie et de Biélorussie vers les pays tiers (sur ces sujets, voir aussi Commission européenne, Communiqué de presse, 22 mars 2024 et Commission européenne, Questions et réponses, 22 mars 2024).
 
Sur ce sujet, voir n° 310-8 Nomenclature tarifaire au niveau communautaire/de l'Union européenne dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
NENC : modifications
 
Les notes explicatives de la nomenclature combinée (NENC) sont modifiées s'agissant de celles relatives :
  • à la sous-position « 3924 90 00 autres » : Articles de ménage ou d'économie domestique et articles d'hygiène ou de toilette, en matières plastiques (à l'excl. de la vaisselle et des articles pour usages sanitaires ou hygiéniques tels que baignoires, douches, lavabos, bidets, réservoirs de chasse, cuvettes d'aisance, leurs sièges et couvercles, etc.) (Notes explicatives de la nomenclature combinée de l’Union européenne (C/2024/2381), JOUE C 27 mars 2024) ;
  • aux sous-positions « 4818 90 90 [Ndlr : Papiers, ouate de cellulose, ou nappes de fibres de cellulose, des types utilisés à des fins domestiques ou sanitaires, en rouleaux d'une largeur <= 36 cm, ou coupés à format; articles à usages domestiques, de toilette, hygiéniques ou hospitaliers, en pâte à papier, papier, ouate de cellulose ou nappes de fibres de cellulose (à l'excl. du papier hygiénique, des mouchoirs, des serviettes à démaquiller, des essuie-mains, des nappes, des serviettes de table, des serviettes et tampons hygiéniques, des couches pour bébés et des articles hygiéniques simil. ainsi que des articles à usages chirurgical, médical ou hygiénique non conditionnés pour la vente au détail)] et 4818 90 10 autres [Ndlr : Articles à usage chirurgical, médical ou hygiénique, non conditionnés pour la vente au détail, en pâte à papier, papier, ouate de cellulose ou nappes de fibres de cellulose (à l'excl. du papier hygiénique, des mouchoirs, des serviettes à démaquiller, des essuie-mains, des nappes, des serviettes de table, des serviettes et tampons hygiéniques, des couches pour bébés et des articles hygiéniques simil.) » (Notes explicatives de la nomenclature combinée de l’Union européenne (C/2024/2381), JOUE C 27 mars 2024) ;
  • à la position 8703 (Voitures de tourisme et autres véhicules automobiles principalement conçus pour le transport de moins de 10 personnes, y compris les voitures du type «break» et les voitures de course (à l’exclusion des véhicules de la position 8702) (Notes explicatives de la nomenclature combinée de l’Union européenne (C/2024/2382), JOUE C 27 mars 2024).
 
Sur ce sujet, voir n° 330-14 Notes explicatives de la nomenclature combinée (NENC) dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
 
Classement des marchandises : fonction principale/accessoire et documentations de l’importateur
 
À propos d’une contestation par la Douane du classement de véhicules utilitaires tout-terrain importés sous la position tarifaire 8701 91 10 00 – « véhicules moteurs essentiellement conçus pour tirer ou pousser d'autres engins… même s'ils comportent certains aménagements accessoires permettant le transport, en corrélation avec leur usage principal, d'outils, de semences, d'engrais, etc. (...) » –, le juge retient que les véhicules classés à la position 8701 doivent avoir pour fonction principale la traction ou la propulsion d'engins, charges ou véhicules et que, si la fonction transport est tout à fait admise, elle demeure cependant accessoire par rapport à la fonction principale. En l'espèce, même si à l'examen des documentations techniques et commerciales produites par l’importateur, la fonction essentielle des véhicules importés consiste à transporter des personnes et des marchandises bien qu'ils soient dotés de dispositifs d'attelage permettant de tirer accessoirement une remorque ou une autre charge, le juge les écarte, la fonction essentielle des véhicules importés n'étant pas caractérisée par la traction d'engins mais par le transport de marchandises au moyen d'une benne basculante (TJ Marseille, 11 mars 2024, nº 22/08527, Kioti France c/ Recette interrégionale des douanes et a.).
 
Sur ce sujet, voir n° 320-5 Commentaire de la règle no 1 dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Accord UE-Nouvelle-Zélande : publication (?) et entrée en vigueur
 
Publication. – L'« accord de libre-échange entre l'Union européenne et la Nouvelle-Zélande » a été publié officiellement (au JOUE L 28 févr. 2024) mais cette publication est considérée comme nulle et non avenue (Rectificatif à l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la Nouvelle-Zélande, JOUE L 25 mars 2024). La décision 2024/244 du 27 novembre 2023 (JOUE L 28 févr. 2024) relative à la conclusion au nom de l'Union dudit ALE est rectifiée pour indiquer que le texte de l’accord n’est pas publié au JOUE du 28 février 2024 mais à celui du 25 mars 2024 (Rectificatif à la décision (UE) 2024/244 (...), JOUE L 25 mars 2024), à tort selon nous puisque dans ce dernier JOUE ne figure étonnamment que le titre de l’accord.
Entrée en vigueur. – La Douane indique que l’accord devrait s’appliquer au 1er mai 2024 et qu’une communication de cette administration est « à venir » sur son contenu, comme d’ailleurs sur la modernisation de la Convention paneuromed (PEM) applicable au 1er janvier 2025 (Webinaire de la Douane, 27 mars 2024, Développez vos exportations avec l'aide de la douane : maîtrisez la notion d'origine pour mieux profiter des accords commerciaux).
 
Sur ce sujet, voir n° 340-100 Accords en attente d'application ou en discussion : les futurs accords dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
ALE UE-Philippines : reprise des négociations
 
Le 18 mars 2024, l'UE et les Philippines annoncent officiellement qu’elles reprennent leurs négociations en vue d’un accord de libre-échange « ambitieux » et qu’elles procèdent désormais « à leurs préparatifs techniques respectifs en vue de la tenue du premier cycle de cette reprise des négociations », qui aurait lieu courant 2024 en principe (Commission européenne, Communiqué de presse, 18 mars 2024). Pour mémoire, cela fait suite à l’annonce du 31 juillet dernier d’explorer un nouveau cadre en vue de cet ALE (voir « Accords en attente d'application ou en discussion » dans « Brèves douanières » au 14 septembre 2023 : textes et informations, Actualités du droit, 18 sept. 2023).
 
Sur ce sujet, voir n° 340-100 Accords en attente d'application ou en discussion : les futurs accords dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Prise en compte du règlement de 2021 pour les BDU et actualisation des restrictions commerciales pour les biens sensibles
 
Relatif « à l'application des mesures restrictives prises à l'encontre de certains États », le décret n° 2024-269 du 26 mars 2024 (JO 28 mars) modifie notamment deux décrets.
 
D’une part, le décret n° 2017-860 du 9 mai 2017, relatif au contrôle à l'exportation, à l'importation et au transfert de biens à double usage et aux mesures restrictives prises à l'encontre de la Syrie, de l'Iran et de la Russie pour étendre son champ d’application d’une manière générale à « certains États » qu’il liste et plus précisément la Biélorussie, la Libye, la Birmanie, la Syrie, le Vénézuéla et le Zimbabwé. C’est ainsi désormais :
  • que son article 1 vise les règlements prévoyant les restrictions au commerce avec ces pays et les articles relatifs aux autorisations d’exportation/importation selon les cas (il ajoute que ces dispositions ne font pas obstacle à la compétence du Premier ministre pour délivrer les autorisations d'exportation mentionnées au I de l’article R. 2335-11 du Code de la défense – c’est-à-dire les licences individuelles ou globales d'exportation –, lorsqu'elles concernent les matériels de guerre et matériels assimilés mentionnés dans l'arrêté du ministre de la défense pris en application du deuxième alinéa de l'article L. 2335-2 du même code) ;
  • et que son article 2 est aussi étendu aux règlements précités s’agissant de l’attestation du ministre de l’Industrie selon laquelle des biens relèveraient du champ d’application d’un de ces règlements et s’agissant de leur classification.
 
D’autre part, le décret n° 2010-294 du 18 mars 2010 portant création de la commission interministérielle des biens à double usage (CIBDU), pour prendre en compte les références du règlement 821/2021 relatif aux BDU et étendre le domaine des avis de cette commission aux exportations listées par les règlements désormais visés par le décret n° 2017-860 ci-dessus.
 
En revanche, on notera que les extensions aux nouveaux pays ci-dessus issues du décret n° 2024-269 précité ne sont pas prises en compte s’agissant des dispositions applicables à la licence individuelle exposées à l'article 2 de l'arrêté du 13 décembre 2001, qui avaient été modifiées par l'arrêté du 27 février 2018 (NOR : ECOI1735492A, JO 6 avr.) notamment pour viser « une exportation mentionnée à l’article 1 du décret n° 2017-860 relatif au contrôle à l'exportation, à l'importation et au transfert de biens à double usage et aux mesures restrictives prises à l'encontre de la Syrie, de l'Iran et de la Russie ». Une précision sur la volonté du pouvoir réglementaire s’agissant d’une extension aux pays nouvellement visés pourrait être utile.
 
 
Lutte contre la contrefaçon : la « boîte à outil » de la Commission
 
La recommandation de la Commission européenne « relative à des mesures visant à lutter contre la contrefaçon et à renforcer le respect des droits de propriété intellectuelle » (Recomm. (UE) 2024/915, 19 mars 2024, JOUE L 26 mars) concrétise son engagement de 2020 d’adopter « une boîte à outil de l’UE contre la contrefaçon » destinée à « promouvoir et faciliter une coopération efficace entre les titulaires de droits, les fournisseurs de services intermédiaires et les autorités compétentes » selon la formule de son considérant 4 : cette boîte à outil encourage « les bonnes pratiques et l’utilisation d’outils appropriés ainsi que des nouvelles technologies ». Retenons notamment que la recommandation :
  • remédie à l’un des premiers obstacles à une coopération utile, c’est-à-dire l’absence de point de contact désigné pour aborder les questions liées aux droits de propriété intellectuelle et aux activités portant atteinte à la propriété intellectuelle (à défaut d’un tel point de contact, pas de moyen de faire respecter rapidement et souplement ces droits, ce qui nuit donc à cette coopération) ;
  • souligne l’importance du stockage et de la destruction des marchandises portant atteinte à la propriété intellectuelle sans mettre en danger la santé humaine et l’environnement (la destruction devant également être plus rapide et moins coûteuse) ;
  • et encourage les États membres à réévaluer si les sanctions nationales sont suffisantes pour être dissuasives (et donc à les rehausser au besoin).
 
Sur ce sujet, voir n° 445-10 Textes applicables au dispositif de l'UE de lutte contre la contrefaçon dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Prescription de la dette douanière : interruption par quel PV ?
 
L’article 354 du Code des douanes dispose que « le droit de reprise de l'administration s'exerce pendant un délai de trois ans, à compter du fait générateur » (al. 1) et que « La prescription est interrompue par la notification d'un procès-verbal de douane » (al. 2). À propos d’accises, un opérateur estime que sa dette est éteinte en raison de la prescription : il se fonde sur la décision qui a retenu que « le procès-verbal d'intervention établi par les agents des services des douanes, qui ne constatait aucune infraction, ni ne relatait aucun acte d'enquête portant sur une infraction préalablement révélée, n'était pas interruptif de prescription » (Cass. crim., 11 mai 2022, nº 20-86.594, arrêt P). En revanche, pour la cour d’appel d’Orléans, « cette décision est étrangère au cas d'espèce, puisque prononcée au visa de l’article 7 du code de procédure pénale et portant sur la prescription de l'action publique en matière pénale ». De plus, ajoute cette juridiction-ci, selon une jurisprudence constante de la chambre commerciale de la Cour de cassation (voir notamment Cass. com., 6 nov. 2019, nº 18-11.557), la prescription du droit de reprise des douanes est « interrompue par la notification d'un procès-verbal de douane de toute nature, dès lors qu'il constitue un acte d'instruction relatif à l'établissement d'une infraction ou à la fixation de l'assiette de la taxe, peu important qu'il ne notifie pas d'infraction ». Enfin, selon les magistrats orléanais, suivre la position de l’opérateur reviendrait à ajouter à l'article 354, alinéa 2, précité une condition que ce texte ne contient pas (CA Orléans, 14 mars 2024, nº 21/02832, Brabant Chimie c/ Direction régionale des douanes et droits indirects du Centre et a.).
 
 
Erreur des autorités compétentes (CDU, art. 119) : pas pour les accises
 
Jugé sans surprise que l’article 119 du CDU qui s’applique aux droits payés à l'importation « ne concerne pas les accises calculées sur le volume de marchandises, indépendamment de leur valeur, qu'elles soient importées ou produites sur le sol national » (TJ Bordeaux, 21 mars 2024, nº 21/03071, Dronne Import c/ Direction régionale des douanes et droits indirects et a.).
 
Sur ce sujet, voir 465-2 Présentation de l'erreur des autorités compétentes dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Respect du DEE avec le CDU : un exemple
 
À propos d’une contestation par la Douane du classement de véhicules utilitaires tout-terrain importés, le juge retient que le droit d’être entendu/l’échange contradictoire préalable prévu par le § 6 de l’article 22 du CDU est respecté lorsque : l’opérateur a été « à chaque étape » mis en mesure de présenter ses observations ; les avis de résultat et les courriers « démontrent la réalité d'un échange constant » entre l’opérateur et la Douane et « la prise en compte de chacun des arguments soulevés, et des éléments de réponse dûment argumentés et motivés qui ont d'ailleurs permis à l'administration de rectifier sa position sur un certain nombre de points » ; le tableau récapitulatif de liquidation communiqué par la Douane dans ses avis de résultat de contrôle, dans les réponses apportées aux contestations de l’opérateur et dans le procès-verbal de notification d'infraction synthétise les conclusions de l'administration développées dans chacun de ces documents ; ce tableau reprend, pour chaque déclaration en douane, les positions déclarées initialement par l’opérateur avec leur valeur et celle reconnue par l'administration et retranscrit les modifications apportées par la Douane au regard des rectificatifs opérés, le numéro de déclaration d'importation permettant à l’importateur de retrouver les factures et références concernées par chaque ligne de liquidation (TJ Marseille, 11 mars 2024, nº 22/08527, Kioti France c/ Recette interrégionale des douanes et a.).
 
Sur ce sujet, voir n° 1005-30 Principes du DEE dans le CDU dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Prélèvement d’échantillon par la Douane et contre-analyse
 
À propos de la soumission de bière à la taxe Premix, il a été jugé qu’à défaut de disposer d'échantillons d’un opérateur qui a constamment indiqué ne pas en détenir, la Douane « pouvait parfaitement faire état des analyses effectuées des mêmes bières édulcorées, fabriquées par le même brasseur, dans le même temps, sachant (...) que les recettes - non communiquées - n'avaient pas changé ». Ces analyses effectuées par un laboratoire agréé dans le cadre d'autres procédures ont été communiquées à l’opérateur et, selon le juge, « les procès-verbaux établis qui font foi jusqu'à preuve du contraire et qui résultent d'analyses effectuées avec les garanties qui s'attachent à l'agrément du laboratoire concerné sont parfaitement opposables au requérant auquel il appartiendrait de rapporter la preuve contraire » : il pouvait « contester ces résultats en sollicitant une expertise à condition de garantir que les marchandises concernées par l'expertise correspondaient aux marchandises taxées et n'avaient pas été altérées de quelque manière que ce soit ». Mais, en l’espèce, l’opérateur n'a demandée ni expertise ni contre-expertise « et ne rapporte nullement la preuve contraire par la production d'analyses effectuées par un laboratoire privé [X] sur des échantillons dont est ignorée la provenance exacte ». Enfin, la demande par cet opérateur d’une contre-analyse d'échantillons placés sous scellés est jugée « tardive » et donc écartée, au motif que « les mécanismes de fermentation et l'altération dans le temps des qualités du produit rendent dès à présent illusoire qu'une telle analyse puisse révéler des résultats fiables » (TJ Bordeaux, 21 mars 2024, nº 21/03071, Dronne Import c/ Direction régionale des douanes et droits indirects et a.).
 
Sur ce sujet, voir 1010-66 Prélèvement d'échantillons par la Douane dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Secret commercial : inopposable
 
Jugé à propos de la soumission de bière à la taxe Premix qu’un opérateur invité par la Douane à en remettre les recettes, mais qui s’y refuse « en opposant un secret commercial », le fait « à tort en raison du secret professionnel auquel le service de contrôle est soumis » (TJ Bordeaux, 21 mars 2024, nº 21/03071, Dronne Import c/ Direction régionale des douanes et droits indirects et a.).
 
Sur ce sujet, voir 1010-71 Secret professionnel : inopposabilité à la Douane dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Prévention des infractions commises par internet des articles 67 D-5 et suivants du Code des douanes : décret d’application
 
Pour mémoire, la loi n° 2023-610 du 6 juillet 2023 (art. 23) a introduit une prévention des infractions commises par l'intermédiaire d'internet par l’ajout des articles 67 D-5 et suivants dans le Code des douanes. Le décret n° 2024-287 du 29 mars 2024 (JO 31 mars), « relatif à la procédure de prévention et de répression de la commission sur internet de certaines infractions douanières et de l'infraction de vente de tabac à distance », définit les conditions d'habilitation des agents des douanes, le contenu de l'avis motivé et des demandes adressées par les agents des douanes, et les conditions et les modalités de la publicité décidée (presse, voie électronique ou affichage) en application des articles 67 D-6 à 67 D-7.
 
Sur ce sujet, voir n° 1010-100 Loi no 2023-610 du 18 juillet 2023 : divers pouvoirs donnés à la Douane dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Sonorisation et captation d'images de l’article 67 bis-5 du Code des douanes : décret d’application
 
Pour mémoire, la loi n° 2023-610 du 6 juillet 2023 (art. 9) a ajouté au Code des douanes l'article 67 bis-5 relatif à la sonorisation et captation d'images dans des lieux ou des véhicules publics ou privés. Ce texte concerne des agents spécialement formés et habilités par le ministre chargé des douanes, dans des conditions fixées par décret. Ainsi, le décret n° 2024-271 du 27 mars 2024 (JO 28 mars) fixe lesdites conditions dans le décret n° 2004-976 du 15 septembre 2004, prévoyant les conditions d'habilitation des agents des douanes visés aux articles 67 bis et 67 bis-4 du Code des douanes, qu’il modifie.
 
 
Restrictions des relations économiques : QPC pour l’article 459 du Code des douanes
 
Cet article 459 dispose en son 4 que les personnes condamnées pour l’infraction prévue en son 1 (donc s’agissant des restrictions aux relations financières avec l’étranger) « sont, en outre, déclarées incapables d'exercer les fonctions d'agents de change, d'être électeurs ou élus aux chambres de commerce, tribunaux de commerce et conseils de prud'hommes, tant et aussi longtemps qu'elles n'auront pas été relevées de cette incapacité ». S’agissant de ce 4, la Cour de cassation renvoie au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité, estimant : « dès lors que la peine d'incapacité qu'il prévoit doit obligatoirement [sic !] être prononcée et que, si le juge peut dispenser le condamné de cette peine ou l'assortir du sursis en application de l’article 369, f, du code des douanes [Ndlr : voir n° 1015-88], il ne peut en moduler la durée, laquelle est perpétuelle en l'absence d'un relèvement » (Cass. crim., QPC, 13 mars 2024, nº 23-90.027).
 
En revanche, dans cette décision ci-dessus, s’agissant du 1 bis ci-dessus de l’article 459, la Haute cour écarte une QPC portant en particulier sur sa conformité « au principe de légalité des délits et des peines, ainsi qu'à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité, en ce qu'il se borne à renvoyer à la réglementation communautaire ou aux traités et accords internationaux sans définir avec la clarté et la précision requises par la Constitution, l'élément matériel constitutif de l'infraction, en l'espèce, les mesures de restriction des relations économiques et financières ». Pour la Cour de cassation en effet, « la notion de mesures de restriction des relations économiques et financières » est « suffisamment précise au regard du principe de légalité des délits et des peines » : « les dispositions contestées sanctionnent uniquement les manquements aux mesures de restriction des relations économiques et financières prévues par la réglementation communautaire prise en application de l’article 215 du Traité sur le fonctionnement de l’union européenne. Or, l'adoption d'un tel règlement doit être précédée d'une décision, adoptée conformément au chapitre 2 du titre V de ce Traité, qui prévoit l'interruption ou la réduction, en tout ou en partie, des relations économiques et financières avec un ou plusieurs pays tiers. Par ailleurs, le règlement, qui est adopté ensuite selon la même procédure, ne peut prévoir que des mesures restrictives à l'encontre de personnes physiques ou morales, de groupes ou d'entités non étatiques ».
 
De même, la Haute cour écarte une QPC portant sur la conformité de l’article 459 en particulier au principe de légalité criminelle, en ce que le législateur, en méconnaissance de sa compétence exclusive en matière répressive, n'a pas prévu les garanties propres à assurer, de manière effective, la protection de la propriété privée, la liberté de circulation des biens et des hommes, l'égalité des citoyens devant la loi et les droits de la personne poursuivie ou sanctionnée. Au contraire, pour la Cour de cassation, s’il est soutenu par l’opérateur « que le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence dans des conditions affectant les droits et libertés cités par cette question dès lors que la sanction prévue au 1 bis de l'article 459 n'est pas précédée d'une notification préalable et effective de la mesure restrictive adoptée à la personne visée », en revanche pour cette cour, « d'une part, seule une personne ayant agi de mauvaise foi peut être condamnée pour le délit prévu par le 1 bis (...) » et d'autre part, les règlements de l'UE ne sont applicables qu'une fois publiés au JOUE.
 
La Haute cour écarte encore un argument fondé sur la méconnaissance du principe de proportionnalité des peines s’agissant encore du 1 bis de l'article 459 au motif, selon l’opérateur, qu'elles sanctionnent un délit pouvant être non intentionnel : au contraire pour le juge, « seule une personne ayant agi de mauvaise foi peut être condamnée » pour ledit délit.
 
Enfin, la Haute cour écarte un argument de l’opérateur fondé sur le fait que le 5 reproduit ci-dessus de l'article 459 méconnaît le principe d'individualisation des peines : pour la Cour de cassation, « si le juge qui prononce une condamnation pour le délit prévu au 1 bis de l'article 459 est tenu d'ordonner la publication de cette décision de condamnation, il peut, en application de l’article 369, f, du code des douanes, dispenser le condamné de cette peine » et il appartient en outre à ce juge « de désigner le ou les journaux dans lesquels la publication aura lieu ainsi que de déterminer si la décision sera publiée dans son intégralité ou non ».
 
Sur ce sujet, voir 1015-37 Restrictions des relations économiques prévues par l'UE (art. 459) dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Détention de marchandises de fraude, transporteur et bonne foi : du classique
 
Si l’article 392 du Code des douanes dispose que « le détenteur de marchandises de fraude est réputé responsable de la fraude », la démonstration de sa bonne foi lui permet d’échapper à cette présomption. Sur le fondement de ce texte, une cour d’appel a relaxé des chefs de détention et transport de marchandises dangereuses pour la santé publique sans document justificatif un transporteur qui apparaît de bonne foi en raison de sa totale ignorance des produits qu’il a transportés dans son camion (en l’espèce des stupéfiants) : les juges du fond ont en effet retenu sa bonne foi aux motifs qu’il n’était pas en mesure de contrôler la marchandise qu'il transportait et n'avait aucun pouvoir d'appréciation sur les documents commerciaux délivrés (les palettes prises en charge en Espagne étaient entièrement et solidement filmées et le transporteur n'avait d'aucune manière le droit d'ouvrir les cartons, au risque qu'ils soient refusés par le client, de telle sorte qu'il ne pouvait en vérifier le contenu dont la nature figurait sur les bons de transport en sa possession) et que les stupéfiants étaient soigneusement camouflés à l'intérieur des palettes, parmi des bouteilles de vin. Mais pour la Cour de cassation, ces motifs sont inopérants : à défaut de relever que le prévenu a établi sa bonne foi en rapportant la preuve de diligences effectuées pour s'assurer de la nature des marchandises transportées, avant même d'en prendre possession, et alors que, selon l'arrêt d’appel, le transporteur ne s'est jamais enquis du contenu des palettes et était en possession d'une lettre de voiture incomplète, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision (Cass. crim., 27 mars 2024, nº 22-84.018).
 
Sur ce sujet, voir n° 1015-46 Exonération pour le transporteur-détenteur et bonne foi dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Le « dossier MACF » de la Douane
 
Bon à savoir ! La Douane a créé sur son site une nouvelle page relative au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (DGDDI, site, page datée du 20 mars 2024) qui mène à un dossier dédié à ce MACF.
 
Organisation de la Douane : « Trésorerie générale des douanes »
 
Après le décret n° 2024-223 du 14 mars 2024 (JO 15 mars), portant création d'un service à compétence nationale dénommé « Trésorerie générale des douanes », l’arrêté du 25 mars 2024 « relatif au réseau comptable de la direction générale des douanes et droits indirects » entre lui aussi en vigueur le 1er avril 2024 (A. 25 mars 2024, NOR : ECOD2408831A, JO 29 mars).
 
« ONAF » : service à compétence nationale au 1er mai 2024
 
Se substituant au service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF), l’Office national anti-fraude (ONAF) est créé officiellement en tant que service à compétence nationale par le décret n° 2024-235 du 18 mars 2024 (JO 20 mars). Ce texte, qui entre en vigueur le 1er mai 2024, introduit donc ce service rattaché conjointement au Directeur général des douanes et droits indirects et au Directeur général des finances publiques pour – selon sa notice – « améliorer la lutte contre les fraudes aux finances publiques, qu'elles soient nationales ou commises au préjudice de l'Union européenne » (donc au détriment des droits de douane notamment) et la lutte contre le blanchiment. Il est complété par un arrêté relatif au service à compétence nationale dénommé « Office national anti-fraude » qui mentionne 10 unités territoriales (A. 18 mars 2024, NOR : ECOP2332108A, JO 20 mars).
 
SITL 2024 : la parole aux directeurs douane des chargeurs sur leur relation avec l’administration
 
Le 21 mars 2024 et pour la première fois sur le Salon international du transport et de la logistique (SITL) a été présenté un baromètre pour mesurer l’état d’esprit des Directeurs douane des chargeurs. Cette étude – le « Baromètre de perception des directeurs douane (édition 2024) » – a été réalisée notamment par l’AUTF et sa Commission Douane & Commerce International. S’agissant de la « Qualité de la relation avec l’administration des douanes », la note globale de 6,6 (sur 10) est la moyenne de plusieurs notes avec des disparités sensibles, selon Jean-Louis Cabot, le vice-président de la commission précitée. Ainsi, par exemple :
  • 7,6 pour « j’estime la qualité de ma relation avec les interlocuteurs de l’administration » ;
  • 7 pour « je suis satisfait des conseils et supports fournis par l’administration » ;
  • 6,2 pour « les délais prévus par l’administration pour l’obtention des autorisations convenus ou prévus sont tenus (RTC, RCO, DCN, REX...) » ; Jean-Louis Cabot relève là un point d’attention estimant que ce n’est pas suffisamment satisfaisant ;
  • ou encore 5,2 pour « je suis confiant dans les évolutions de la réglementation à venir (les évolutions de la réglementation sont en ligne avec les intérêts de mon entreprise) ».
 
S’agissant du thème « Perception des contrôles et contentieux », la note globale de 5,6 comporte notamment l’affirmation « les contrôles ex post exigent moins de ressources » qui n’obtient que 5. Là encore, Jean-Louis Cabot alerte sur la quantité sensible d’énergie à déployer par les directeurs douane pour répondre à ces contrôles.
 
Selon les conclusions présentées, « dans l’ensemble, la satisfaction des chargeurs concernant l’écosystème douanier est moyenne », mais « on note une très bonne satisfaction sur les relations avec les prestataires RDE » (hors expressistes avec lesquels les relations sont jugées au contraire « plutôt insatisfaisantes »). Enfin, la douane en entreprise demeure « une fonction stratégique, mais peu connue et mal comprise ».
 
Le 20 mars 2024 au SITL, l’AUTF et la Douane française ont signé une convention de partenariat pour renforcer la synergie entre cette administration et les chargeurs représentés par cette fédération et pour favoriser la croissance des entreprises françaises et faciliter le développement à l’international des PME (voir https://www.douane.gouv.fr/actualites/la-douane-et-lautf-signent-une-convention-pour-faciliter-le-developpement-des-pme et https://autf.fr/actus-evenements/actualites/lautf-signe-un-partenariat-avec-la-douane).
 
Source : Actualités du droit