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Futurs CDU et autorité douanière de l’UE : l’avis du Cese

Transport - Douane
18/12/2023
Le 8 décembre 2023 a été publié l’avis du Comité économique et social européen (Cese) sur la proposition de règlement établissant notamment le futur Code des douanes de l’Union et l’autorité douanière de l’UE : au programme, des critiques, des précisions et des souhaits d’ajouts et d’anticipation.
Pour mémoire, en mai 2023, la Commission a proposé un règlement sur le futur du Code des douanes de l'Union et de l’union douanière (voir Réforme de l’union douanière et du CDU : première présentation synthétique, Actualités du droit, 24 mai 2023). Sur ce texte en cours d’examen, le Comité économique et social européen a donné l’avis exposé ci-après via une présentation thématique (non exhaustive). Les points mentionnés ci-dessous sont ceux de l’avis, certains étant d’ailleurs parfois très proches les uns des autres, voire quasi-identiques.
 
Décision douanière prise sur demande
 
Valeur du silence. – Le Cese « désapprouve » la proposition de tenir une demande pour rejetée si la Douane ne respecte pas les délais fixés pour la communication de sa décision. Contrairement à la proposition (voir le texte ci-dessous), le Comité estime que, dans de tels cas, les demandes devraient être considérées comme acceptées (point 1.6). Le texte en son état actuel équivaut à instaurer un principe selon lequel le « silence vaut refus » et, selon le Comité, cela porte « illégalement préjudice au demandeur tout en encourageant l’irresponsabilité de la part de l’autorité douanière » : il souhaite donc à l’inverse que toute demande soit considérée comme acceptée si la Douane ne respecte pas les délais pour y répondre (point 4.2), autrement dit que le silence vaille acceptation.
 
Texte de l’article 6 « Décisions prises sur demande » : « Lorsque les autorités douanières ne prennent pas de décision dans les délais fixés aux premier, deuxième et troisième alinéas, le demandeur peut considérer que sa demande a été rejetée et peut faire appel d'une telle décision négative. Le demandeur peut également informer l'autorité douanière de l'UE que les autorités douanières n'ont pas pris de décision dans les délais impartis. »
 
Exclusion du DEE. – Pour le Comité, « il est essentiel de déterminer l’autorité chargée d’évaluer le respect des conditions énoncées à l’article 6, paragraphe 6, deuxième alinéa, point c), de la proposition »; il souligne aussi le manque de clarté du point f) du même alinéa  (voir ci-dessous), ouvrant la voie à toutes sortes d’interprétation. Le règlement devrait préciser directement ces points, et non pas renvoyer aux actes délégués comme proposé (points 1.6 et 4.3).
 
Texte de l’article 6 précité, § 6, excluant le droit d’être entendu (DEE) : « Le premier alinéa ne s'applique pas dans les cas suivants :
- (...) (c)lorsque la nature ou le niveau d'une menace pour la sécurité et la sûreté de l'Union et de ses résidents, pour la santé humaine, animale ou végétale, pour l'environnement ou pour les consommateurs l'exige ;
- (f) dans d'autres cas particuliers. »
 
Délais. – Les 30 jours accordés à la Douane pour « seulement vérifier si les conditions d’acceptation d’une demande de décision sont remplies » constituent un délai (trop) long pour le Cese. Idem pour le délai de 120 jours concernant à la prise de décision après l’acceptation de la demande. Ces délais (qui existent déjà actuellement) devraient être réduits à l’article 6, § 2 et 3, selon le comité (point 4.1).
 
Plateforme des données douanières - Data hub
 
Applications de connexion définies par l’autorité douanière de l’UE. – Selon le Comité, afin de « garantir une coordination et une interopérabilité complètes », les États membres doivent accepter que l’autorité douanière de l’UE développe les applications de connexion utilisées par chacun d’entre eux pour se connecter à la plateforme des données douanières de l’UE, « au lieu de les développer eux-mêmes comme le suggère l’article 30, paragraphe 1, de la proposition » (point 4.12). Et « le règlement devrait définir avec précision des règles d’accès et des conditions de confidentialité afin de garantir la protection des informations sensibles et établir une responsabilité claire pour les entités et les personnes ayant obtenu un accès à ces données » (point 1.11).
 
Plateforme de signalement. – Pour le Cese, « la participation des utilisateurs et la collaboration avec les organisations de la société civile sont indispensables pour identifier les marchandises non conformes entrant sur le marché de l’UE », ou pour lesquelles existent des raisons suffisantes de croire qu’elles ne sont pas conformes à la législation applicable de l’Union. Une plateforme de signalement devrait être mise en place au sein de la plateforme des données douanières de l’UE pour soulever ces cas de non-conformité aux normes auprès des autorités de surveillance du marché (points 1.13 et 4.18).
 
Point de contact spécifique pour l’accès aux données sensibles. – Le Cese suggère que chaque autorité désigne un « point de contact spécifique » ayant accès aux données sensibles (une ou plusieurs personnes, avec des règles de responsabilité, des règles d’accès spécifiques, des règles de confidentialité et des conditions d’utilisation de la plateforme des données douanières de l’UE) (point 4.14).
 
Autorité douanière de l’UE
 
PME. – Pour le Cese, les opérateurs de l’UE « devraient bénéficier d’un accès sans restriction à l’ensemble des lois, réglementations, lignes directrices et conseils pertinents ayant trait à leurs opérations douanières » et il demande donc « expressément » que l’autorité douanière de l’UE « joue un rôle spécifique dans le soutien aux PME » pour « les aider à se familiariser avec la législation et les formalités douanières » ; cette mission serait à ajouter à l’article 208 du règlement proposé (points 1.13 et 4.22).
 
Anticipation. – Le Cese demande que l’autorité douanière de l’UE devienne opérationnelle deux ans (voire un an) après l’entrée en vigueur du règlement proposé et non pas en 2028 (art. 238). De même, devraient être réduits les délais prévus (janvier 2032) pour que les opérateurs utilisent la plateforme des données douanières de l’UE (points 1.16 et 4.25).
 
Mainlevée et délai raisonnable
 
Le « délai raisonnable » dans lequel les autorités sont réputées avoir octroyé la mainlevée aux marchandises lorsqu’elles ne les ont pas sélectionnées pour un contrôle (art. 60, § 6, du règlement proposé) devrait être fixé par le règlement proposé plutôt que de renvoyer aux actes délégués (point 4.4).
 
Opérateurs économiques agréés (OEA)
 
Avantages. – Selon le comité, il est « essentiel » d’améliorer l’accessibilité au statut OEA pour les petites entreprises et « d’introduire davantage de simplifications » pour les titulaires de ce statut, « étant donné que les avantages actuels offerts par ce statut ne l’emportent pas suffisamment sur les coûts liés à sa demande et à son maintien » (points 1.10 et 4.7 quais identiques).
 
Critères. – Le Cese estime que les critères d’octroi du statut d’OEA de l’article 24 sont « vagues et ambigus » (point 4.7). Remarquons qu’ils sont semblables à ceux actuellement existants.
 
Planification des ressources de l’entreprise (PRE). – Si la Douane doit procéder à un examen approfondi des opérations et des registres internes des OEA au moins une fois tous les 3 ans (art. 23, § 3, du règlement proposé), selon le Cese, « La volonté des entreprises d’accorder aux autorités douanières un accès direct à leurs systèmes de planification des ressources de l’entreprise (PRE) reste incertaine et dépendra de la capacité de la Commission européenne à garantir de manière fiable que les informations confidentielles seront protégées » (point 4.8).
 
Opérateurs économiques de confiance certifiés (Trust and Check traders)
 
Les opérateurs économiques de confiance certifiés seraient introduits à partir de 2032, quand la plateforme des données sera disponible, et les procédures simplifiées pour les OEA seraient remplacées en 2037, lorsque l’ensemble des opérateurs devra utiliser le data hub. Le Cese « considère qu’il serait possible d’avancer le calendrier prévu pour mettre en œuvre cette nouvelle conception pour les opérateurs, au cas où la plateforme des données serait disponible avant 2032 » (point 4.9).
 
« Dialogue » douane-opérateurs
 
Le Comité souligne l’obligation faite aux douanes de « maintenir un dialogue permanent avec les opérateurs économiques et les autorités intervenant dans le commerce international des marchandises et de promouvoir la transparence, y compris en mettant gratuitement à disposition les formulaires de demande », comme le mentionne l’article 39 (§ 2) du règlement proposé (qui vise toutefois un dialogue « régulier »).
 
Autres étonnants sujets
 
Alors qu’il existe par ailleurs des textes dédiés, le Cese semble recommander aussi l’ajout/l’adoption de dispositions s’agissant :
  • des sanctions contre la Russie et la Biélorussie (voir étude n° 435) : pour aider les opérateurs à respecter les réglementations instaurant ces sanctions, « des interprétations officielles juridiquement contraignantes sont nécessaires, ainsi que des mesures volontaristes de la part des autorités pour garantir le respect des règles et remédier aux points faibles qui existent dans l’ensemble de l’Union » (point 1.5) ; il s’agit d’éviter les contournements des sanctions (point 3.8) ;
  • de la lutte contre la contrefaçon (voir étude n° 445) : les produits contrefaisants devant être détruits dans des installations spécialisées réglementées en raison de leur composition inconnue, « un réseau d’installations agréées, ayant fait l’objet d’un audit, pour la destruction et le recyclage » de ces marchandises devrait être mis en place (point 4.10).
Source : Actualités du droit