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Contestation d’un AMR : les points de départ de la réponse de la Douane et de la saisine du juge

Transport - Douane
10/11/2023
La date de réception du courrier recommandé de contestation de l’AMR, accompagné des pièces justificatives, adressé par l’opérateur à la Douane fait courir le délai de réponse de cette administration, mais pas l’envoi d’un courriel informatif de l’avocat de l’opérateur à cette administration, selon un arrêt de la cour d’appel de Colmar du 20 octobre 2023. Cette décision rappelle aussi que la date de réception du courrier recommandé de réponse de la Douane à la contestation fait courir le délai de saisine du juge matérialisée par la remise au greffe de la copie de l’assignation, la seule délivrance de cette dernière à la Douane étant insuffisante.
À propos de TICPE, un opérateur contestant l’AMR qui lui est notifié par la Douane est débouté par le juge qui retient la prescription de son action. Explication de détail des aspects temporels sur fond des articles 346 et 347 du Code des douanes.
 
Point de départ du délai de réponse de la Douane à la contestation : réception de la contestation
 
Pour mémoire, l’article 346 du Code des douanes dispose notamment que la Douane statue sur la contestation de l’opérateur quant à la dette douanière « dans un délai de six mois à compter de sa réception » de cette contestation.
 
Dans cette affaire, pour le juge, l’opérateur a effectué sa contestation par une lettre recommandée avec accusé de réception accompagnée des pièces justificatives et le délai de réponse des 6 mois de la Douane court à compter de sa date de réception, en l’espèce le 18 juin 2018 (même si le courrier est daté du 14 juin 2018), de sorte que cette dernière avait jusqu'au 18 décembre 2018 inclus pour « statuer ».
 
Dans cette affaire, le juge écarte l’argument de l’opérateur selon lequel un courriel du 14 juin 2018 lu par la Douane le 15 juin 2018 constitue sa contestation : en effet, ledit courriel du 14 juin 2018 « réceptionné » le 15 juin 2018 dont se prévaut l’opérateur pour faire courir le délai de réponse de l'administration « est sans emport dès lors que, d'une part, l'avocat de [l’opérateur] y indique qu'est joint à ce courriel l'acte de contestation qui sera notifié avec les pièces en recommandé avec avis de réception le lendemain matin, ce qui tend à démontrer que cet envoi par courriel n'a été fait qu'à titre informatif avant la formalisation officielle et complète du lendemain, et, d'autre part, l'avis de réception du 15 juin 2018 dudit courriel mentionne clairement qu'il témoigne de ce que le courriel a été affiché sans pour autant être une garantie de lecture à cette date du 15 juin 2018 ». L’intérêt pour l’opérateur était là d’éviter la prescription en faisant reconnaitre que la Douane avait répondu au-delà du délai des 6 mois, ce qui lui aurait permis d’assigner dans les 5 ans (voir ci-dessous).
 
Point de départ du délai de 2 mois de saisine du juge en cas de réponse de la Douane à la contestation dans les six mois : date de réception du courrier recommandé de l’administration
 
Selon l’article 347 du Code des douanes, le redevable peut « saisir » le tribunal judiciaire :
En l’espèce, pour le juge, la Douane a bien statué dans le délai de six mois imparti puisque la contestation a été rejetée par un courrier « envoyé » le 17 décembre 2018 en recommandé avec accusé de réception, ledit courrier ayant été « reçu » par l’opérateur le 19 décembre 2018, ce dernier avait donc jusqu'au 19 février 2019 inclus pour saisir le tribunal judiciaire.
 
 
Remarques
Si la Douane a « statué » dans le délai (ce que la date du 17 décembre 2018 de son courrier atteste), notons que cette information est portée à la connaissance de l’opérateur après le délai des 6 mois, la date de réception du courrier étant le 19 décembre 2019, et que cette date-ci de réception fait courir le délai de deux mois pour la saisine du juge.
Une précédente décision avait déjà retenu dans le même sens que la date de l'avis de réception soit le 30 août 2016, du courrier recommandé du 24 août 2016 de la Douane portant rejet de la contestation d’un AMR, fait courir pour l’opérateur le délai de 2 mois expirant le 30 octobre 2016 à minuit pour saisir le juge au sens de l’article 347 précité (CA Rouen, 19 nov. 2020, n° 19/02897, BSN Médical Distribution c/ Direction régionale des douanes et droits indirects).
 
Une réponse ayant été apportée dans les 6 mais par la Douane, l’opérateur avait donc deux mois pour saisi le juge.
 
Saisine du juge : par remise au greffe d’une copie de l’assignation
 
Se fondant sur l’article 757 du Code de procédure civile alors applicable (dont les dispositions sont reprises désormais à l’article 754 du CPC), qui dispose que le tribunal est saisi, à la diligence de l'une ou l'autre partie, par la remise au greffe d'une copie de l'assignation, le juge retient que « si l'assignation introduit l'instance, seule sa remise au greffe saisit la juridiction ». Et en l’espèce les copies des assignations délivrées par l’opérateur ayant été remises par voie électronique au greffe le 21 février 2019, donc au-delà de la date limite de saisine de la juridiction (le 19 février 2019 à minuit) prévue par l'article 347 précité, son action est irrecevable pour être prescrite.
 
Remarques
La décision de la Cour d’appel de Rouen précitée avait aussi retenu dans le même sens que le délai de deux mois imposé par l’article 347 précité « est imparti, non pas pour engager l'action, par la délivrance de l'assignation, mais pour saisir le tribunal, c'est à dire, conformément à l'article 757 du code de procédure civile en sa rédaction alors applicable, pour remettre au greffe une copie de l'assignation » (CA Rouen, 19 nov. 2020, n° 19/02897, BSN Médical Distribution c/ Direction régionale des douanes et droits indirects).
 
Source : Actualités du droit