<< Retour aux articles
Image

« Brèves douanières » au 29 septembre 2023 : la jurisprudence

Transport - Douane
03/10/2023
Les jurisprudences « en bref » diffusées depuis juin 2023 non traitées par ailleurs « dans ces colonnes ».
DEE du CDU : cas de transmission au SCL
 
Visant l’article 22 (§ 6) du CDU, et donc le droit d’être entendu (DEE) s’agissant d’importation, une cour d’appel retient à propos du classement de marchandises que ce DEE est respecté, alors qu’un opérateur avance au contraire l'absence de transmission à son endroit de « l'exhaustivité des documents » transmis par la Douane au Service commun des laboratoires (SCL) qui a procédé à 2 études : pour ce juge, « outre que cette demande ne peut être satisfaite eu égard à son caractère trop général, qui ne vise qu'à sous-entendre une transmission occulte », la Douane, dans sa réponse aux observations de l’opérateur dans le cadre du DEE, indique que le SCL a été destinataire de « toutes les informations communiquées [Ndlr : par l’opérateur] en matière de processus de production, spécifique à » chaque produit, et l’opérateur ne conteste pas avoir été destinataire des avis du SCL dans leur intégralité (CA Montpellier, 5 sept. 2023, nº 21/04853, Safram France c/ Direction régionale des douanes et droits indirects ; CA Montpellier, 5 sept. 2023, nº 21/04855, Tradall c/ Direction régionale des douanes et droits indirects). Cette solution repose sur les affirmations de la Douane qui ne semblent pas faire l’objet d’un contrôle du juge.
 
Sur ce sujet, voir n° 1005-30 Principes du DEE dans le CDU dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Droit d'être entendu (DEE) de 2010 à 2016 : contenu de la réponse de la Douane aux observations de l’opérateur
 
Jugé que, même si dans sa décision de rejet des arguments exposés par l’opérateur dans le cadre du DEE la Douane reprend dans sa réponse les termes de sa lettre faisant part à celui-ci de son intention de rejeter sa demande, elle a tenu compte des observations de celui-ci et les droits de la défense ne sont pas violés (CA Rouen, ch. civ. et com., 7 sept. 2023, nº 21/03010, Direction régionale des douanes et droits indirects du Havre c/ Balimoon Surgelés).
 
Sur ce sujet, voir n° 1005-6 DEE (2010-2016) : réponse de la Douane aux observations de l'opérateur dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Annulation de saisie « non fondée » et indemnisation : conditions des articles 401 et 402
 
L’article 402 du Code des douanes, qui dispose que « lorsqu'une saisie opérée en vertu de l'article 323-2 ci-dessus n'est pas fondée, le propriétaire des marchandises a droit à un intérêt d'indemnité, à raison de 1 % par mois de la valeur des objets saisis, depuis l'époque de la retenue jusqu'à celle de la remise ou de l'offre qui lui en a été faite », ne s’applique pas à la saisie des marchandises qui n'a été effective qu'en vertu d’un procès-verbal établi sur le fondement, non pas du Code des douanes, mais des articles L. 212A, L. 213 et R. 226-2 du Livre des procédures fiscales (CA Besançon, 20 juin 2023, nº 21/01711, Lowiee Trade SL c/ Direction régionale des douanes et des droits indirects).

Selon l’article 401 du Code des douanes, l'administration des douanes est responsable du fait de ses employés, dans l'exercice et pour raison de leurs fonctions seulement, sauf son recours contre eux ou leurs cautions. Pour le juge, « la mise en œuvre de cette responsabilité suppose la preuve d'un comportement fautif, d'un préjudice réel et certain et d'un lien de causalité direct entre la faute et le fait générateur et les dommages allégués, lequel ne peut être déduit notamment du simple abandon des poursuites » : en effet, « il ne saurait être exigé de l'administration des douanes qu'elle puisse, dès le moment du contrôle, déterminer l'issue de la procédure, (...) l'abandon des poursuites ne constitue pas une faute » et l’opérateur « n'établit pas qu'elle pouvait raisonnablement exclure toute infraction » dès le début du contrôle douanier. De plus, s’agissant du caractère certain du préjudice, il n’est pas prouvé lorsque l’opérateur « se limite à affirmer le caractère inutilisable de la marchandise, non démontré par les seuls constats d'huissier de justice réalisés (...) lesquels consistent en des photographies et des consignations d'affirmations énoncées par les représentants » de l’opérateur (même décision).
 
Sur ce sujet, voir n° 1010-48 Annulation de saisie « non fondée » et indemnisation dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Fouille irrégulière d’un véhicule sous l’empire de l’article 60 du Code des douanes : pas de nullité d’ordre public
 
Il avait été jugé que, ne comportant « aucune garantie posée par la loi visant à s'assurer de l'authentification des recherches et découvertes effectuées », l'article 60 du Code des douanes n'autorise pas « la visite d'un véhicule stationné sur la voie publique ou dans un lieu accessible au public libre de tout occupant » (Cass. crim., 23 févr. 2022, no 21-85.050, P, BTL 2022, p. 143 ; voir Article 60 du Code des douanes : pas de visite d’un véhicule vide sur la voie publique, Actualités du droit, 9 mars 2022). L’affaire a été renvoyée devant la cour d’appel de Lyon dont la décision a aussi fait l’objet d’un pourvoi au terme duquel la Cour de cassation a retenu dans un arrêt confirmatif que, l’irrégularité relative aux conditions dans lesquelles les douaniers ont procédé à la fouille n'étant pas d'ordre public, il n'y a lieu de prononcer la nullité de la procédure que s'il est résulté de cette irrégularité une atteinte aux intérêts du propriétaire du véhicule fouillé, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, celui-ci n’ayant pas contesté la présence dans son véhicule des objets découverts et ne démontrant pas que l'irrégularité de la visite lui a causé un grief particulier (Cass. crim., 27 sept. 2023, nº 23-80.314, B, se fondant sur les articles 171 et 802 du Code de procédure pénale et rejetant l’argument selon lequel la fouille réalisée en l'absence de tout témoin constitue une nullité d'ordre public ne nécessitant pas qu'il soit fait la démonstration d'un grief).
 
Sur ce sujet, voir n° 1010-19 Droit de visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes (art. 60) avant la loi no 2023-610 dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Audition libre de l’article 67 F du Code des douanes : douanier interprète, mais pas chargé du dossier
 
Il résulte de la combinaison des articles 67 F et 61-1 du Code des douanes et de l’article D. 594-16 du Code de procédure pénale que la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui n'est pas placée en retenue douanière ne peut être entendue sur ces faits qu'après avoir été informée, le cas échéant, du droit d'être assistée par un interprète, lequel ne peut être choisi parmi les agents des douanes chargés du dossier (Cass. com., 30 août 2023, nº 20-14.727, B, cassant CA Saint-Denis de la Réunion, 24 déc. 2019, n° 18/00146, Directeur régional des douanes de Mayotte c/ X ; voir Audition libre : cas du douanier-interprète, Actualités du droit, 10 janv. 2020).
 
Sur ce sujet, voir n° 1010-60 Audition libre (« question/réponse ») dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Droit de visite d’un navire : le recours de l’occupant des lieux ne s’étend pas au propriétaire non occupant
 
S’agissant du recours de l’occupant des lieux dans la cadre d’une visite de navire de l’article 63 du Code des douanes (recours qui existe dans les mêmes termes pour l’article 62 du même code), il avait été notamment jugé par la cour d’appel de Paris qu’il s’étendait au propriétaire du navire (CA Paris, 5 oct. 2022, n° 22/05931, X c/ Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED) ; voir Droit de visite d’un navire de l’article 63 du Code des douanes : le juge ne reste pas vague !, Actualités du droit, 12 oct. 2023). Cette décision est cassée en toutes ses dispositions : pour la Cour de cassation, selon le V de l’article 63, qui a pour objet d'assurer le respect du domicile et de la vie privée de la personne qui demeure dans les lieux visités, seul l'occupant des locaux affectés à un usage privé ou d'habitation d'un navire peut former le recours prévu par ce texte contre le déroulement des opérations de visite desdits locaux ; aussi, s'il n'est pas effectivement occupant des locaux visités, le propriétaire du navire n'est pas recevable à exercer ce recours prévu au V de l'article 63 ; or, en l’espèce, pour admettre le recours du propriétaire à l'encontre du PV de visite de la cabine du capitaine, l'ordonnance, après avoir relevé que ce PV relate sommairement la visite de la cabine de ce dernier, occupant des lieux, retient (à tort donc selon la Haute cour) que le propriétaire effectif du navire doit, en cette qualité, être considéré comme occupant des lieux, au sens du III, B, de l’article 63 et disposer d'un recours contre le déroulement des opérations de visite (Cass. com., 5 juill. 2023, nº 22-22.290, B). Sur des critiques de la solution, voir DMF 2023, p. 710, Obs. Ginter E..
 
Sur ce sujet, voir n° 1010-40 Droit de visite des navires dans un port, dans une rade ou à quai (art. 63) dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Modulation des peines de l’article 369 du Code des douanes : motivation mais pas dispense
 
Reprenant à l’identique la formule de ses précédents arrêts de janvier et février 2023 s’agissant de la motivation de la modulation des peines de l’article 369 du Code des douanes (Cass. crim., 5 janv. 2023, n° 21-87.258, B, voir Amende et article 369 du Code des douanes : motiver quel que soit le montant, Actualités du droit, 10 janv. 2023 ; Cass. crim., 1er févr. 2023, n° 21-84.059, voir Amende minimale et article 369 du Code des douanes : obligation du juge de motiver, Actualités du droit, 15 févr. 2023), la Cour de cassation y ajoute à la suite que c’est « sans avoir toutefois la possibilité de l'en dispenser totalement » que le juge peut prononcer l’amende : la Haute cour censure donc la cour d’appel qui, en méconnaissance des textes et principes ci-dessus, « n'a prononcé contre les prévenus aucune amende douanière, fût-elle d'un montant symbolique », mais a seulement prononcé la confiscation douanière en retenant, après avoir rappelé les articles 369 et 414, que, « compte tenu de l'importance relative du produit de l'infraction, du contexte de commission de l'infraction empreinte d'incompétence et d'inexpérience, et en l'absence d'antécédent judiciaire, il y a lieu d'ordonner à titre de peine principale la confiscation des pierres précieuses objet de l'infraction douanière » (Cass. crim., 28 juin 2023, nº 22-81.956).
 
Sur ce sujet, voir n° 1015-88 Modulation des peines (art. 369) dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Droits de douane : notification, puis prise en compte
 
Les articles du Code des douanes de l’Union relatifs à la notification et à la prise en compte des droits de douane n'envisagent pas une chronologie impérative prise en compte-communication comme le faisait le CDC et la jurisprudence s’y appliquant. Au contraire, l’article 102 du CDU prévoit notamment (hors le cas de son § 2, lorsque que le montant des droits exigibles correspondant à celui mentionné dans la déclaration en douane, l'octroi de la mainlevée des marchandises valant décision notifiant au débiteur la dette douanière) que « la dette douanière est notifiée au débiteur par les autorités douanières lorsque ces dernières sont en mesure de déterminer le montant des droits à l'importation ou à l'exportation exigibles et d'arrêter une décision en la matière » (§ 3) et l’article 105 du même code dispose que (hors le cas de son § 1 où la dette douanière nait de l’acceptation de la déclaration et implique une prise en compte dans les 14 jours à compte de la mainlevée), la prise en compte du montant des droits exigibles « intervient dans un délai de quatorze jours à compter de la date à laquelle les autorités douanières sont en mesure de déterminer le montant des droits à l'importation ou à l'exportation en cause et d'arrêter une décision » (donc après la notification).

Visant cet article 105 (§ 3), la cour d’appel de Paris retient qu’une procédure est régulière lorsqu’une liquidation supplémentaire figure en annexe d’un procès-verbal du 12 octobre 2017, ce que permet la réglementation en vigueur, et que « le montant des droits a été pris en compte suite au procès-verbal de constat du 12 octobre 2017, notifié par courrier recommandé, avant de faire l'objet d'un AMR le 17 novembre 2017 » (CA Paris, 19 juin 2023, n° 21/16584, Valpaco France c/ Direction régionale des douanes). Ce faisant, cette cour écarte les arguments de l’opérateur s’agissant d’une part de l’AMR du 17 novembre 2017 visant la liquidation supplémentaire qui caractérisait la prise en compte et s’agissant d’autre part de la chronologie impérative (prise en compte puis notification des droits) et donc d’une concomitance irrégulière de celles-ci (argument qui était recevable sous l’empire du CDC). Cette cour confirmerait aussi la position de la Douane : celle-ci, dans ses écritures, avance qu'avant l'entrée en vigueur du CDU, lorsqu'une dette douanière était découverte lors d'un contrôle, « la prise en compte devait intervenir préalablement à l'enclenchement de la procédure contradictoire ou à la notification au redevable de tout acte mentionnant la dette », et que, depuis l'entrée en vigueur du CDU au 1er mai 2016, la Douane est tenue de notifier la dette qui résulte d'un contrôle et ne correspond pas au montant mentionné dans la déclaration dès qu'elle est en mesure d'arrêter une décision à cet effet. « En pratique », ajoute cette administration, elle « doit notifier la dette douanière par un avis de paiement qui est remis au redevable concomitamment avec le procès-verbal de notification » et, conformément à l’article 105 précité, « la prise en compte doit désormais intervenir dans un délai maximal de 14 jours à compter de la notification de la dette douanière au moyen de l'avis de paiement ».
 
Sur ce sujet, voir n° 1020-44 AMR douanier – Procédure antérieure et communication/notification des droits dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Prise en compte puis communication et DEE
 
Selon l’article 221 de l’ex-CDC, le montant des droits doit être communiqué au débiteur dès qu'il a été pris en compte par la Douane et, pour être régulière, la communication du montant des droits doit avoir été précédée de leur prise en compte. Cette prise en compte qui consiste en « l'inscription du montant des droits » par la Douane « dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu », est « totalement distincte » du droit d'être entendu (DEE) prévu par l’article 67 A du Code des douanes (CA Rouen, ch. civ. et com., 7 sept. 2023, nº 21/03010, Direction régionale des douanes et droits indirects du Havre c/ Balimoon Surgelés). Selon les écritures de la Douane dans cette affaire, elle « ne peut en aucun cas différer la prise en compte de la dette à l'issue de la procédure du droit d'être entendu » et « la prise en compte obligatoire de la dette dès que l'administration constate un défaut de paiement qu'elle estime dû et qu'elle est en mesure de calculer le montant des droits qui en résultent ne remet pas en cause le droit d'être entendu accordé à l'opérateur qui entraîne une rectification si les observations de ce dernier apparaissent fondées ».
 
Sur ce sujet, voir n° 1020-40 AMR douanier – Procédure antérieure et prise en compte des droits dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Communication irrégulière des droits de douane à l’opérateur : sa caution ne peut être actionnée (suite et fin)
 
À la suite de la décision de la CJUE commentée dans ces colonnes (CJUE, 9 mars 2023, n° C‑358/22, Bolloré logistics SA c/ Direction interrégionale des douanes et droits indirects de Caen et a. ; voir Communication irrégulière des droits de douane à l’opérateur : sa caution ne peut être actionnée, Actualités du droit, 15 mars 2023), la Cour de cassation suit l’interprétation de son homologue de l’UE : elle censure la cour d’appel qui a retenu (à tort donc) que des droits sont devenus exigibles à l'égard d’un opérateur en sa qualité de caution solidaire pour n'avoir pas été payés à l'échéance par l’opérateur-cautionné (ce dernier n'ayant déféré ni à l'avis de paiement ni à l'AMR), alors que la juridiction du fond a constaté que le montant des droits n'avait pas été régulièrement communiqué à l’opérateur-cautionné, de sorte que la dette douanière n'était devenue exigible ni à l'égard de ce dernier, débiteur principal, ni à l'égard de la caution (Cass. com., 21 juin 2023, nº 19-23.516, cassant partiellement CA Caen, 10 sept. 2019, n° 18/02953, Bolloré Ports Cherbourg et a. c/ Direction interrégionale des douanes et droits indirects de Caen et a.).
 
Sur ce sujet, voir n° 1020-44 AMR douanier – Procédure antérieure et communication/notification des droits dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
AMR et recours contre le rejet de cette contestation : pas de saisine du juge par la Douane
 
Il résulte de des articles 346 et 347 du Code des douanes relatifs à la contestation de la créance de l'AMR et au recours contre le rejet de cette contestation que seul le redevable peut saisir le tribunal judiciaire et non la Douane, celle-ci ne pouvant donc pas s'acquitter de l'invitation qui lui est faite en ce sens par un juge à peine de forclusion (CA Agen, 30 août 2023, nº 23/00266, Direction interrégionale du Grand-Est c/ Goeven, où l’opérateur n’a pas contesté l’AMR lui-même mais l'interprétation de la Douane sur l'étendue dans le temps d’un rescrit qu'elle a accordé constituant ainsi une différence d'appréciation ayant pour conséquence indirecte de remettre en cause le montant de la somme réclamée par cet AMR).
 
Sur ce sujet, voir n° 1020-66 AMR douanier et contestation de la créance dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Origine, statut et droits de douane : confusion
 
Jugé de façon erronée, à propos de cerises d’origine polonaise exportées de Pologne vers la Serbie, puis réimportées (sans transformation) dans l’UE, que s’il est constant que les produits originaires d'un pays de l'UE, perdent leur statut UE lorsqu'ils sont exportés vers un pays hors UE comme en l'espèce la Serbie, cependant l'accord entre l'UE et la Serbie a pour objet de supprimer les droits des douane pour les marchandises originaires des deux parties et il y a lieu de constater que les marchandises en litige sont d'origine polonaise, donc de l’UE, et que, lors de leur exportation entre la Serbie et l'UE, elles ont conservé cette origine, ce qui leur permet de bénéficier du tarif préférentiel de l’accord, lequel ne fait pas référence à la notion de « statut douanier » (CA Nancy, 3 juill. 2023, nº 22/01406, Administration des douanes et a. c/ Olniro). On opposera à cette solution, comme le fait la Douane, que les marchandises (ré)importées de Serbie étant d’origine UE (et non de Serbie), l’accord précité ne leur est pas applicable, et que lors de l'importation d'une marchandise dans l’UE, « seul compte le statut de la marchandise (et non son origine) », étant précisé qu'une marchandise perd automatiquement son statut de l’UE quand elle sort du territoire de l'UE, même temporairement, et qu’une marchandise sortie du territoire de l’UE, si elle a conservé son origine « Union européenne », a néanmoins perdu son statut communautaire et doit être considérée comme tierce au moment de sa réimportation dans le territoire de l'UE et est assujettie au tarif extérieur commun et éligible au paiement des droits et taxes afférents.
 
Sur ce sujet, voir n° 340-4 Origine et statut douanier dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Délivrance d’un certificat d'origine « formule A » dans le SPG
 
Relatif au certificat d’origine formule A dans le cadre du SPG, l’article 97 terdecies de l’ex-CDC, RA (repris en cela par l’article 74 du CDU, AE) disposait notamment en son point 2 : « À titre exceptionnel, un certificat d'origine 'formule A' peut toutefois être délivré après l'exportation des produits auxquels il se rapporte :
a) s'il n'a pas été délivré au moment de l'exportation à la suite d'erreurs, ou d'omission involontaires ou en raison de circonstances particulières, ou
b) s'il est démontré à la satisfaction des autorités gouvernementales compétentes qu'un certificat d'origine 'formule A' a été délivré, mais n'a pas été accepté à l'importation pour des raisons techniques (...) ».

Il a été jugé sur le fondement de cet article 97 terdecies que, si des certificats d'origine ont été produits au moment de l'exportation et si ce n'est pas pour des raisons techniques qu'ils n'ont pas été acceptés, les conditions de cet article-ci ne sont pas remplies (autrement dit, il ne permet pas la production d’un nouveau certificat d’origine si un premier certificat d’origine a déjà été produit mais n’a pas été accepté pour des raisons de fond : certificats invalidés ou déclarés faux) et un importateur ne peut donc pas justifier de l'origine de son produit par la délivrance de nouveaux certificats en invoquant les « circonstances particulières » au sens de cet article (CA Rouen, ch. civ. et com., 7 sept. 2023, nº 21/03010, Direction régionale des douanes et droits indirects du Havre c/ Balimoon Surgelés). 
 
Sur ce sujet, voir n° 350-50 Certificat d'origine « formule A » – Délivrance et duplicata dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
FORM A considérés comme corrects par les autorités du pays bénéficiaire du SPG
 
Même si l’autorité douanière du pays d’exportation considère que des certificats Formule A « auraient dû être regardés comme corrects » dans une lettre adressée à la Douane française, cette dernière n’est pas liée par ce document (CA Rouen, ch. civ. et com., 7 sept. 2023, nº 21/03010, Direction régionale des douanes et droits indirects du Havre c/ Balimoon Surgelés, rappelant CJUE, 8 nov. 2012, n° C-438/11, Lagura Vermögensverwaltung GmbH c/ Hauptzollamt Hamburg-Hafen).
 
Sur ce sujet, voir n° 345-64 Portée des constatations des autorités d'un pays bénéficiaire quant à l'origine d'une marchandise dans le SPG dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
« Situation particulière » de l’article 239 de l’ex-CDC/équité de l’article 120 du CDU : deux délais de demande différents
 
L’article 121 du CDU (entré en vigueur le 1er mai 2016) prévoit que la demande de remboursement ou remise présentée sur le fondement d'une « situation particulière »/équité de l’article 120 du même Code doit être déposée dans un délai de trois ans à compter de la date de la notification de la dette douanière. Il n’est toutefois pas applicable lorsque la notification de la dette a eu lieu comme en l’espèce, les 18 et 27 juin 2014 : en effet le délai applicable à la demande est celui (ici expiré) de l'article 239 de l’ex-CDC qui prévoyait notamment qu’elle fut « déposée auprès du bureau de douane concerné avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date de la communication desdits droits au débiteur » (ce délai de 12 mois n’a pas été repris par l’article 120 du CDU qui a pris la suite de l’article 239). Aussi, un opérateur ne peut pas utilement se prévaloir des articles 121 et 120 du CDU dès lors que le délai dont il disposait était déjà expiré à la date de leur entrée en vigueur (CA Rouen, ch. civ. et com., 7 sept. 2023, nº 21/03010, Direction régionale des douanes et droits indirects du Havre c/ Balimoon Surgelés).
 
Sur ce sujet, voir n° 460-50 Équité et « circonstances particulières » : correspondance entre le CDU et le CDC dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Équité et « circonstances particulières » : cas de faux certificats d’origine (rappel)
 
Jugé dans le cadre du SPG que la confiance de l’importateur dans la validité de certificats d'origine qui se révèlent faux, falsifiés ou non valables ne constitue pas, en tant que telle, une situation particulière au sens de l’article 120 du CDU (CA Rouen, ch. civ. et com., 7 sept. 2023, nº 21/03010, Direction régionale des douanes et droits indirects du Havre c/ Balimoon Surgelés, rappelant que la CJUE a retenu en 1996 que les contrôles a posteriori seraient en grande partie privés de leur utilité si l'utilisation de faux certificats pouvait, à elle seule, justifier l'octroi d'une remise et que la solution contraire pourrait décourager le zèle des opérateurs économiques et faire supporter par le Trésor public un risque qui incombe principalement aux agents économiques ; CJCE, 18 janv. 1996, n° C-446/93, SEIM - Sociedade de Exportação e Importação de Materiais Ldª c/ Subdirector-Geral das Alfândegas, points 44 et 45).
 
Sur ce sujet, voir n° 460-54 Équité et « circonstances particulières » : cas exclus dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Erreur des autorités compétentes : application dans le temps de l’article 119 du CDU
 
L’article 119 du CDU, qui concerne la remise ou le remboursement en cas d'erreur des autorités compétentes étant entré en vigueur le 1er mai 2016, il n'est donc pas applicable à une affaire dans laquelle la dette douanière et même l'avis de mise en recouvrement sont antérieurs cette date : dans ce cas, seules dispositions de l’article 220 de l’ex-CDC s’appliquent (CA Rouen, ch. civ. et com., 7 sept. 2023, nº 21/03010, Direction régionale des douanes et droits indirects du Havre c/ Balimoon Surgelés).
 
Sur ce sujet, voir n° 465-2 Présentation de l'erreur des autorités compétentes dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Révocation du statut d’OEA et de RDE : urgence d’un référé (non)
 
Saisissant le juge des référés en vue de la suspension d’une décision de la Douane révoquant son autorisation d'opérateur économique agréé pour les simplifications douanières (OEA-C), un opérateur justifie (mais sans succès) l’urgence de sa demande par un préjudice suffisamment grave et immédiat qui serait porté à sa situation ou à ses intérêts (conséquences financières et attractivité commerciale) : il avance que la révocation, d'une part, de l’autorisation précitée et, d'autre part, de son autorisation de représentant en douane enregistré (RDE), de ses agréments d'expéditeur agréé transit et de destinataire agréé transit, ainsi que des conventions d'accès aux télé-procédures en découlant (dédouanement et transit, DELTA G et DELTA T), et de son autorisation de garantie globale avec réduction des montants de la garantie financière, ont des conséquences irrémédiables et immédiates le « privant de toutes les autorisations nécessaires pour exercer son activité de représentant en douane, laquelle représenterait une part très significative de son activité et est essentielle pour son attractivité commerciale, en ce qu'elles ont ainsi pour effet de lui interdire d'accomplir des formalités douanières pour le compte d'autrui, en particulier pour la société Orano (ex-Areva), en ce qui concerne l'importation de minerai d'uranium, et en ce qu'elles vont probablement impliquer le licenciement de son salarié du bureau de Sète, qui effectue les déclarations en douane, ainsi que la dénonciation immédiate de son contrat avec la société Orano ». En revanche, pour le juge, l’opérateur qui appartient au groupe Navitrans, exerce, outre une activité de RDE, les activités de transitaire portuaire, de commissionnaire de transport, d'organisateur de transport, et d'agent maritime. Or, d'une part, si l'activité d'organisateur de transport de marchandises est liée à celle de RDE, l’opérateur n'établit ni même n'allègue qu'il ne pourrait continuer à exercer les autres activités du fait de la révocation des différentes autorisations et conventions d'OEA et de RDE (le seul bilan simplifié de ses comptes annuels pour 2022 qu'il produit ne démontre par ailleurs ni le caractère prépondérant de son activité de RDE, ni une éventuelle mise en danger de son équilibre économique et financier du fait de ces révocations). D'autre part, depuis le 1er février 2020, son activité de RDE est déjà en partie sous-traitée ou externalisée auprès d'une ou d'autres sociétés. De plus, le licenciement avancé n'est pas démontré. Enfin, la Douane a mis en place des dérogations aux révocations contestées afin de permettre la continuation des opérations d'importations d'uranium pour la société Orano, en autorisant l’opérateur à procéder à la validation de titres de transit pour le compte de la société Orano Cycle, et en maintenant la convention DELTA T et les autorisations d'expéditeur et de destinataire agréé après la date d'applicabilité de la révocation de l'autorisation d’OEA précitée afin que les opérations de transit prévues au mois de juin 2023 puissent être menées à terme, ses allégations concernant l'éventualité d'une dénonciation de son contrat avec la société Orano n'étant étayées par aucune pièce (TA Marseille, 1er sept. 2023, nº 2306849).
 
Sur ce sujet, voir n° 855-98 Révocation/modification d'une autorisation d'OEA dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Preuve de l’exportation (CGI, ann. III, art. 74) : cas de rejet
 
Au visa notamment de l’article 74 de l’annexe III du CGI, relatif aux preuves à l’exportation pour le bénéfice de l’exonération de TVA, le tribunal administratif de Marseille écarte la production par un opérateur d’une part des factures comportant les noms des clients et leurs adresses et d’autre part des déclarations d'exportation comportant l'indication de la date de l'inscription, du nombre, des marques et des numéros de colis, de l'espèce tarifaire, de la valeur et de la destination des objets et marchandises ainsi que le nom du client et de l'exportateur, au motif qu'aucun des destinataires figurant sur ces factures ne correspond aux deux seuls destinataires figurant sur les déclarations d'exportation établies par ailleurs en 2017 (pour des opérations antérieures). L'attestation des Douanes algériennes établie en 2019 reprenant la liste des factures communiquées par l’opérateur, qui ne comporte aucune référence à des documents douaniers, n’établit pas non plus la réalité des exportations (TA Marseille, 6e ch., 30 mai 2023, nº 2003229).
 
Sur ce sujet, voir n° 615-67 Nature et portée de l'acceptation des preuves alternatives fiscales à partir du 8 mars 2010 dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Classement des marchandises : usage effectif du produit (non)
 
Jugé classiquement que « l'usage effectif d'une marchandise qui n'est pas une qualité inhérente à celle-ci, ne peut pas être retenu en vue de déterminer son classement tarifaire au moment de l'importation ». Il s’agit là de la reprise d’une formule d’un arrêt de la Cour de cassation de 2020 (CA Paris, 19 juin 2023, n° 21/16584, Valpaco France c/ Direction régionale des douanes).
 
Sur ce sujet, voir n° 320-8 Commentaire de la règle no 1 : utilisation du produit dans Le Lamy Guide des procédures douanières.
 
Procédure : représentation obligatoire et appel
 
L’article 367 du Code des douanes, selon lequel en première instance et sur appel, l'instruction est verbale sur simple mémoire et sans frais de justice à répéter de part et d'autre, ayant été abrogé par l'article 5 (visant à étendre la représentation obligatoire) de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice nº 2019-222 du 23 mars 2019, et l'article 109-II de cette loi disposant que son article 5 (hors 5-II) est applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, il en résulte pour la cour d’appel de Montpellier que « depuis cette date, seules les dispositions des articles 901 et 930-1 du code de procédure civile, dans les matières que la cour examine avec représentation obligatoire par un avocat, selon lesquelles les déclarations d'appel doivent être remises à la juridiction par voie électronique, sont applicables ». Aussi, un opérateur ayant interjeté appel par lettre recommandée déposée au greffe le 6 août 2021 à l'encontre du jugement du tribunal judiciaire en date du 1er juillet 2021, dans l'instance l'opposant à la Douane, cet appel, formé par lettre recommandée selon la procédure sans représentation obligatoire, doit être déclaré irrecevable (CA Montpellier, 5 sept. 2023, nº 21/05766, Safram France c/ Direction régionale des douanes et droits indirects de Montpellier ; CA Montpellier, 5 sept. 2023, nº 21/05767, Tradall c/ Direction régionale des douanes et droits indirects de Montpellier).

Pour la cour d’appel d’Orléans, ensuite de l’abrogation de l’article 367 précité, dans le chapitre III relatif à la procédure devant les tribunaux, à la section 2 intitulée « procédure devant les juridictions civiles », aucun texte ne déroge aux règles de procédure ordinaire devant les juridictions civiles. Dès lors qu'il n'en est plus disposé autrement depuis le 1er janvier 2020, la procédure suivie devant la cour d'appel en matière douanière est celle de droit commun, c'est-à-dire la procédure ordinaire avec représentation obligatoire (CA Orléans, 22 juin 2023, nº 21/01546, Gardner Aerospace Mazeres c/ Direction régionale des douanes et des droits indirects du Centre Val de Loire et a.).
 
Sur ce sujet, voir n° 1617 Règles de procédure civile dans Le Lamy transport, tome 2.
 
Source : Actualités du droit