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Marchandises en retour : réimportation dans le « même état » et positions tarifaires différentes

Transport - Douane
07/04/2021
Des fruits secs et des emballages exportés sous une position tarifaire et revenus en corbeille de fruits sous une autre ne bénéficiant pas de l’exonération de droits de douane au titre du régime des marchandises en retour, une décision de la Cour de cassation du 31 mars 2021 censure une cour d’appel qui n’a pas recherché, comme elle y était invitée, notamment si la différence entre ces positions tarifaires existait, mais a retenu que, la présentation des marchandises ayant changé, la condition relative au « même état » des marchandises était considérée comme remplie.
L’arrêt de la Cour de cassation ici exposé fait suite à la décision de la cour d’appel de paris du 29 octobre 2018 contre laquelle la Douane a formé un pourvoi (CA Paris, 29 oct. 2018, nº 17/22395, Z pour le Receveur Régional des douanes et droits indirects de Paris-Est c/ Comptoir Commercial d’Orient ). Pour la clarté du propos, nous reprenons ici en grande partie la présentation de la décision d’appel que nous avions faite dans ces colonnes (voir notre actualité).
 
Enjeu du régime des retours
 
Le régime des retours permet la réimportation en franchise de droits de douane d'une marchandise et s'applique aux marchandises de l’UE ou mises en libre pratique qui, ayant fait l'objet d'une exportation, sont réimportées « dans le même état » sous un délai de trois ans en principe.
 
« Même état » contre « manipulation »
 
En 2013, sous l’empire du Code des douanes communautaire (CDC), un opérateur en France acquiert des fruits secs et des corbeilles et les exporte vers la Tunisie d’où, après confection par un partenaire local, reviennent dans l’Hexagone des corbeilles de fruits. L’opérateur qui prétend bénéficier du régime des retours se voit opposer un refus de la Douane au motif que les marchandises qu’il a importées sont des « corbeilles fondamentalement différentes des produits exportés » : autrement dit, la condition d’un retour dans le « même état » exigée par l’article 186 du CDC relatif au régime des retours ne serait pas remplie.
 
Pour l’opérateur, les marchandises exportées sont parfaitement identifiables dans les marchandises réimportées et n’ont « subi qu'une modification de leur présentation comme le permet la réglementation ». De fait, il se fonde sur l’article 846 du règlement d’application du Code des douanes communautaire (CDC, RA) alors applicable qui dispose que, par dérogation aux dispositions de l'article 186 du CDC, bénéficient de l'exonération des droits à l'importation les marchandises en retour se trouvant dans différentes situations, et notamment celles « qui, après leur exportation hors du territoire douanier de la Communauté, n'ont fait l'objet que de traitements nécessaires à leur maintien en bon état de conservation ou de manipulations modifiant leur seule présentation ».
 
Pour la cour d’appel, qui va dans le sens de l’opérateur, la modification de présentation est autorisée par la réglementation et, en l’espèce, seule la présentation du produit est modifiée, puisque les marchandises exportées en vrac sont ensuite disposées en assortiment dans un contenant comportant plusieurs fruits différents. Aussi, « les opérations consistant à trier les fruits, les calibrer, les nettoyer, les conditionner dans des emballages appartenant aux producteurs ne constituaient pas des opérations de façonnage » (qui auraient exclu de bénéficier du régime sollicité), l'exonération des droits de douane étant donc due à l’opérateur.

Questions restées sans réponse du juge du fond
 
Approuvant le pourvoi de la Douane, la Cour de cassation censure la décision de la cour d’appel qui n’a pas répondu, comme elle y était invitée, à la question de l’administration s’agissant de savoir notamment si une marchandise exportée sous une position tarifaire différente de celle sous laquelle elle avait été réimportée ne pouvait pas être regardée comme ayant été réintroduite dans le « même état » que celui dans lequel elle avait été exportée. Autrement dit, si la position tarifaire est différente, la condition de « même état » de la marchandise n’est pas remplie et le bénéfice du régime des retours devrait alors être écarté.
 
Par ailleurs, la Haute cour reproche également à la cour d’appel de ne pas avoir non plus répondu à la question de savoir si le fait que l’opérateur ait, par le passé, bénéficié du régime de perfectionnement passif (PP) ne le rendait pas inéligible au régime des marchandises en retour pour des opérations similaires.
 
L’affaire est renvoyée devant la cour d’appel de Paris autrement composée.
 
Plus d’information sur ce sujet dans Le Lamy guide des procédures douanières, n° 630-10, et dans Le Lamy transport, tome 2, n° 1614. La décision ici présentée est intégrée à ces numéros dans la version en ligne des ouvrages sur Lamyline dans les 48 heures au maximum à compter de la publication de la présente actualité.
 
Source : Actualités du droit